• Chapitre 9 : Offrez-moi de l’aide.

     

                Jean-Marc hâtait le pas. La nuit commençait à tomber, il voulait réussir à faire ce qui était préférable avant que le voile de l’obscurité ne s’étende sur la ville. Il y avait tant de chose à encore faire. Récupérer de l’argent pour avoir toujours la même somme sur lui puis trouver ce qu’il cherchait.

                Il n’arrivait toujours pas à croire que cette femme lui avait volé tant d’argent. Et tout ça à cause du parasite qu’était Sullyvanne. Il regrettait le jour où il avait voulu écrire un livre. S’il avait su qu’il devrait supporter un personnage comme elle, il aurait refusé de commencer ce projet.

                Elle était bien trop agaçante. Le pire étant encore qu’elle ne supportait pas qu’il l’estime de la sorte. Maintenant qu’elle avait une main, ou peut-être même deux vu la vitesse avec laquelle elle en usait, elle le frappait à la moindre pensée qui lui déplaisait. Il n’aimait vraiment pas ça. La sensation était désagréable et, en plus, il ne pouvait même pas soulager la douleur sans paraître suspect.

                Jean-Marc s’arrêta à quelques pas de l’école. Il soupira en regardant l’édifice. Selon ses élèves, cet endroit devenait glauque à la tombée de la nuit. Pourtant, ça restait une bâtisse pareille. C’était les mêmes pierres, les mêmes vitres, les mêmes pièces.

                C’était pour cela qu’il savait où est-ce qu’il devait aller.

                Il espérait qu’il trouverait la solution pour se défaire de la chose qui lui pourrissait la vie depuis un peu trop longtemps.

                Une claque retentit, entendue et ressentie uniquement par lui. Il grogna alors qu’il poussa la porte de sa délivrance.

     

                Faustine se pencha au-dessus du divan pour prendre une télécommande. Elle changea alors une émission qui parlait des masques de carnaval viennois pour mettre une émission de jardinage. Mathias applaudit, tout sourire. Il s’installa correctement dans le divan, en tailleur. La femme lui donna un petit coup sur la tête puisqu’il exhibait ainsi sa culotte. Certes ils étaient seuls et elle l’avait créé ainsi, mais tout de même !

                Mathias voulut reprendre une position plus normale lorsqu’on sonna à la porte. L’enseignante fronça les sourcils. Elle ignorait qui ça pouvait bien être alors qu’il était déjà vingt heures. Elle lança un coup d’œil vers sa cuisine où l’attendait la vaisselle puis elle s’obligea à venir ouvrir.

                Qu’elle ne fut pas sa surprise de trouver son collègue dans l’encadrement de sa porte. Jean-Marc afficha un large sourire, glissant ses doigts dans ses cheveux. Il voulait se donner un air charmeur. Mais ça ne tira qu’un air agacé à Faustine. Elle croisa les bras alors que Mathias se levait pour venir la rejoindre.

    - Comment te retrouves-tu ici ? Demanda-t-il.

    - J’ai été trouvé votre adresse là où ce serait facile de le faire. J’ai été voir une voyante… elle m’a arnaquée. Mais elle m’a parlé de choses étranges. Je me suis dit que tu pourrais… m’aider…

                Faustine ne manqua pas de remarquer que les mots semblaient être arrachés à la gorge de l’homme. Elle avait envie de lui refermer la porte au nez. Au lieu de quoi, elle se déplaça pour lui laisser le chemin. Jean-Marc entra alors, le nez retrousser. Il n’aimait pas cette odeur de café qui imprégnait l’air.

                Il se rendit jusqu’au divan où il s’installa sans honte. Mathias fit la moue avant de venir sur l’accoudoir, le regard tourné vers la télévision où on expliquait comment installer des repousses de pelouse.

    - B’jour Mathias. Dit Sullyvanne.

    - Bonjour !

    - Le problème est encore et toujours Sullyvanne ! Dit Jean-Marc en désignant l’air.

                Il ignorait où est-ce qu’elle était exactement. Mais il savait qu’il recevrait un coup aussitôt qu’il dirait ou penserait quelque chose de mal à son égard. Il avait d’ailleurs l’impression d’entendre grogner dans son oreille.

    - Je t’ai déjà dit que je ne pourrais rien faire pour toi ! C’est à toi de t’accorder avec ton personnage. Répliqua Faustine.

    - Elle n’en fait qu’à sa tête !

    - Et alors ? N’est-ce pas une bonne façon d’écrire ? Il ne faut jamais se reposer sur ses lauriers, vous savez ? Une histoire peut toujours être améliorée.

    - C’est peut-être parce que vous n’avez pas le talent… Supposa Jean-Marc.

    - Quoi ?! S’écria Mathias.

                Au même moment, l’homme eut une violente baffe sur l’arrière du crâne. Il grogna en se frottant la zone douloureuse. Faustine eut un léger sourire.

                Jean-Marc se retint de faire la moue. Il remarqua un paquet de feuille posé sur un bureau. Il s’en approcha. C’était raturé, corrigé, annoté. Il se doutait de ce que c’était. Poussé par sa curiosité, il attrapa les premières feuilles et lu.

                Faustine se tendit alors en le voyant faire. Mais elle n’avait pas la force de lui dire de ne pas le faire. Elle était trop timide.

     

    « Prologue

                Lorsque le monde est né, les races furent créées en deux sexes précis : le féminin et le masculin. Quelques fois, la nature est un peu défectueuse et elle crée, par mégarde, les deux en un seul : l’hermaphrodisme.

                Quelques fois, la faute de la nature est plus grande encore. Ce n’est pas que le corps comporte deux sexes. C’est qu’il comporte celui qu’il ne faut pas. Il existe des cas peu grave mais d’autre qui le sont bien plus…

    Chapitre 1

                Une peau d’opaline, des yeux vert pommes pétillants et rieur, une longue chevelure d’un blond platine presque blanche, un corps élancé, des gestes charmeurs. Rien en ce corps ne semblait prouver la triste vérité. Ce n’était pas que cet être avait été doté d’une poitrine si horriblement menue qu’elle semblait inexistante, c’était que la poitrine n’existait pas.

                Ce n’était que lorsqu’on voyait ce corps en sous-vêtements, ou que l’on essayait de voir sous ses délicats jupon, que l’on se rendait compte de ce qu’il était vraiment. Pas le corps d’une femme avec quelque traits masculins qui n’étaient pas si disgracieux. Le corps d’un homme.

                S’il avait pu simplement cacher son sexe avec quelque vêtement un peu ample,  mais seyant, il aurait été ravi. Malheureusement, ses parents l’avaient affublés d’un nom horrible à son sens. Trop masculin. Il aurait été ravi de s’appeler Emmanuel, Dominique, Joël ou Frédérique. Le rêve aurait été de pouvoir s’appeler Camille ! Un nom masculin qui était devenu plus féminin qu’autre chose. (Symbole de la féminité) 

                Malheureusement…

                Il s’appelait Mathias.

    - Mathias ! interpella une voix féminine depuis l’étage inférieur. (Elle provenait de l’étage inférieur) »

                Jean-Marc posa la feuille, lançant un vague regard vers Faustine qui restait silencieuse. Elle avait mis ses mains dans son dos et elle triturait ses ongles d’un air nerveux. Elle estimait que le texte n’était pas encore prêt à être lu. Il y avait encore tant de correction à faire. Quelques fautes d’orthographe immonde, elle le savait.

                En plus, c’était tout de même un professeur de français qui lisait ce texte. Il ne pourrait qu’être critique. Elle savait qu’il le serait.

    - Quantième réécriture ?

    - Troisième réécriture, septième correction. On travail dessus depuis trois ans maintenant. Expliqua Faustine.

                L’homme eut un rire.

                Sullyvanne soupira puis lança :

    - Dis-moi Mathias, comment es-tu devenu semi-corporel ?


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  • Chapitre 10 : Ce qu’il y a à l’intérieur.

     

                Mathias tourna la tête vers Jean-Marc qui grimaçait. Il n’était pas sûr de vouloir voir Sullyvanne. Certes, il savait que son physique serait intéressant mais il n’ignorait pas que sa création serait imbuvable.

    - Tu comptes rester longtemps Jean-Marc Narine ? Questionna Faustine.

    - Narean ! Et pourquoi pas ?

    - Il s’impose. Remarqua Sullyvanne. Ah les hommes !

    - Trop ! Soupira Mathias.

                Jean-Marc lança un regard atterré au travesti. Celui-ci sursauta et passa ses doigts dans ses cheveux, un peu paniqué.

    - Mes rubans sont mal mis ?

    - Mais non, tu es parfaite, chérie. Lui dit Faustine depuis la cuisine.

    - Ouf !

                Le professeur de français prit place dans un fauteuil.

    - Aloooooooooooors ?! Lança Sullyvanne d’une voix toute guillerette.

    - Ah oui ! Et bien, j’ai eu un corps lorsqu’un lien s’est fait entre Faustine et moi ! Lorsque nous avons commencé à nous comprendre et à vivre ensemble. À vrai dire… j’ai eu un corps, immatériel, depuis le jour où elle a accepté de faire… ce corps-ci !

                Il se leva et tournoya sur lui, tout sourire. Sullyvanne rit.

    - Ça ne s’entend pas, mais j’applaudis !

    - Merciiiii !

    - Voilà une raison de plus pour ne pas écrire de suite. Trancha l’homme.

                Il sentit une douleur à l’arrière de son crâne, une fois encore, et grogna. Il lança un regard agacé vers la gauche où il devinait sa « fille ».

                Faustine revint dans la pièce. Elle posa devant Jean-Marc une sorte de gobelet remplit d’une étrange substance. Il plongea dedans sa fourchette pour voir qu’il ressortait de longues nouilles qui baignait dans un breuvage brun.

                Il se tourna vers sa collègue, sourcil froncé alors que les deux personnages de roman rigolaient.

    - Ce sont des nouilles instantanées, chéri. Ricana Mathias.

    - Probablement la meilleure chose au monde. Avança Faustine en plongeant ses baguettes dans son propre plat.

    - J’ai habitude de manger des plats plus… raffinés. Je cuisine moi-même.

    - Moi je n’ai pas le temps. Répondit la femme.

                Elle se mit en tailleur dans son fauteuil. Jean-Marc regarda vers la télévision. Cette émission ne lui plaisait pas du tout. D’ailleurs, à en voir l’expression de sa collègue, c’était pareil pour elle. Mais Mathias irradiait en fixant l’écran.

                Jean-Marc regarda les nouilles et il y goûta. Il eut une moue déçue lorsque la saveur explosa dans ses papilles. Ce n’était vraiment pas ce qui lui plaisait.

                Mathias se leva d’un bond et sautilla sur place, dans cet horrible bruit de talon, en désignant la télévision.

                Jean-Marc tourna la tête pour voir une tondeuse à gazon électrique dans des tons roses fuchsia. L’homme ne put qu’afficher une moue écœurée.

    - Faustiiiiiiiine ! On l’achète ?! Elle ne coûte que 365,99 € !!!

    - Je voudrais bien, chérie, mais tu oublies quelque chose ?

    - Ce serait stupide ? Marmonna Jean-Marc.

    - On n’a pas de jardin.

                Mathias se rassit dans le fauteuil en soupirant.

    - Je te tapote l’épaule. Informa Sullyvanne.

    - C’est gentil !! Jean-Marc, il faut que tu lui donnes un corps, la pauvre !

    - Mon texte est très bien !

    - Jean-Marc ? Intervint Faustine. Pourrais-je le lire ? Tu pourras lire le manuscrit complet de « On ne juge pas un livre sur sa couverture ».

    - Je pourrais donner mon avis ?

    - Bien sûr. Sourit la professeur de science.

    - Bien… nous échangerons nos manuscrits demain. Ne lésine pas sur les commentaires, toi non plus. Mais je doute que tu trouves grand-chose.

    - On verra bien. Sourit la femme.

     

                Le lendemain, Faustine donnait son cours de science. Plus précisément de biologie. Mathias était assis sur son bureau, occupé à caresser le petit cactus qui y était posé. Entre autre parce qu’il ne pouvait pas se blesser dessus, aussi par amour pour la plante.

    - Je répète la question… où se trouve l’hémoglobine ? Dit Faustine en souriant.

                Aucune main ne se dressa. La femme se passa la main sur le visage se retenant d’avoir l’air dépité. Pourtant, elle l’était.

    - Si je te donne la bonne réponse, je pourrais avoir ma tondeuse ?

                Faustine lança une petite moue désapprobatrice à Mathias. Celui-ci lui fit une tête de petit animal battu.

    - Alors ? Demanda la femme à ses élèves.

                La sonnerie retentit. Elle n’eut pas le temps de leur offrir la réponse qu’ils rangèrent leurs affaires et sortirent de la classe.

    - Faites les exercices de la page six ! Leur cria la professeur.

                Elle n’entendit aucune réponse. Elle soupira. Faustine récupéra son manuscrit sur son bureau puis elle sortit de la pièce. Elle regagna alors la salle des professeurs où elle trouva son collègue. Lui aussi avait son manuscrit sur lui.

                Il vint vers elle après avoir jeté un regard à ses autres collègues. Il était toujours aussi gêné de devoir discuter avec elle devant tout le monde. Il le voyait aux regards. Même les adultes étaient mauvais et mesquins, contrairement à ce qu’on croyait. Pourquoi s’intéresser à une femme qui ressemblait à une adolescente un peu trop gothique ?

                Jean-Marc posa son manuscrit sur la petite table réservée à la professeur de science.

    - Je vous informerais au plus tôt de ce que j’en ai pensé. Dit-il.

    - Merci. Je ferais de même. Je suis en train de corriger alors j’aurais peut-être un peu de retard.

    - Oui. Je comprends…

                Faustine sourit et elle s’installa à son bureau. Elle prit sa tasse de café. L’homme retourna à sa place, lui aussi. Il entendit la voix de Sullyvanne. Elle était toujours là. Il n’arrivait pas à se défaire d’elle. C’était une des raisons pour laquelle il ne voulait vraiment pas qu’elle devienne matérielle. Il savait à quel point ce serait pénible. Elle serait toujours dans son champ de vision, exubérante.

                Déjà qu’elle se glissait toujours dans sa salle de bain…


     


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  • Chapitre 11 : L’avis et la vérité.

     

                Jean-Marc était sous sa douche lorsqu’il ressentit l’impression d’être épié. Il se passa la main sur le visage avant de regarder les rideaux. Même sans ses lunettes, ils lui semblaient suffisamment opaques. Bien que…

    - Sullyvanne ! Vas-tu sortir de cette salle de bain ?

    - Mais je m’ennuiiiiie ! J’ai déjà lu vingt fois le Prologue de l’histoire de Mathias. J’ai déjà regardé toutes tes couvertures… y en a une qui est obscène et pas mon genre.

    - Regarde la télévision.

    - Elle est coupée !

    - Regarde par la fenêtre.

                Il entendit Sullyvanne soupirer. Il eut l’impression qu’elle s’éloignait. Il soupira à son tour, content qu’elle soit partie. Il termina sa toilette.

     

                Faustine venait de s’installer dans le divan. N’en ayant que faire de l’émission qui pouvait bien y avoir, elle avait mis un programme qui parlait des fleurs afin de calmer Mathias. Le travesti regarda le programme avant de se tourner vers sa créatrice. Celle-ci avait préparé une tasse de café et avait le manuscrit de Jean-Marc juste à côté.

    - Faustiiiiiiiiiine ?

    - Quoi ?

    - Je peux avoir une autre tenue ? Demanda Mathias.

    - Quel genre de dépravation tu veux encore me faire faire ? Nargua la femme.

    - Je veux juste une nuisette blanche et noire. Alleeez, sort ton clavier magique !

                La professeur attrapa son clavier déconnecté. La force de Mathias s’était insinué dedans à tel point qu’il agissait réellement sur lui. Il suffisait juste qu’elle écrive et ça s’appliquait au travesti. C’était ce qu’il avait fini par appeler le « clavier magique ». Elle aurait pu le faire sur un simple bloc-notes mais l’un et l’autre trouvait cela plus amusant ainsi.

                Elle commença alors à taper des mots. Les vêtements de Mathias changèrent dans une lumière un peu rosée. Il se leva et tourna sur lui-même, ravi de ses nouveaux vêtements. Vu comme elle était courte, Faustine se félicita de ne pas avoir oublié la culotte pour une fois.

    - Alors… prêt à lire ce manuscrit ? Demanda-t-elle.

    - Ouiii !

                Mathias vint s’asseoir en tailleur à côté d’elle. Il mit ses mains sur ses genoux puis attendit qu’on lui fasse la lecture.

     

                Jean-Marc sirota son thé au fruit rouge. Il renifla dédaigneusement pour la cinquième fois en moins de dix minutes.

    - Quoiiiii ?

    - Mathias est intéressé par un homme…

    - Mathias se prend pour une fille. C’est normal qu’il préfère les hommes… enfin « normal ». Faut pas que je disse ça, je suis mal placée pour parler de normalité et tout…

    - De quoi tu parles ?

                Sullyvanne dut se rapprocher de lui. Du moins, il en eut la sensation.

    - Je suis lesbienne…

    - Hein ?

    - J’aime les femmes… t’as un micro-cerveau ou quoi ?

    - Je n’ai jamais écrit ça ! S’insurgea Jean-Marc.

    - Non… mais tu l’as suffisamment sous-entendu puis… j’ai décidé de le devenir aussi. Je préfère ça.

    - Décidé… De quoi tu parles ?

    - J’aime pas les garçons. Je préfère les filles… je suis devenue lesbienne. Répondit-elle d’un air détaché.

    - Je… ne… m’attendais pas à ça…

    - Il faut que tu apprennes à lire entre les lignes.

    - Entre les lignes ? De ce que moi j’ai écrit ?

    - Tu n’as pas la main basse sur tout… je suis une partie de l’histoire. Je la guide autant que toi.

    - Tu la guide…

    - On écrit à quatre mains ! Je t’insulte des idées, des sentiments… Mathias fait la même chose avec Faustine. Discuter avec elle aurait dû t’apprendre à ce genre de chose.

    - Ça me semblait toujours aussi bizarre.

                Il y eut un grésillement dans l’air. Il fronça les sourcils et regarda par là. Pendant un instant, il eut l’impression de voir une silhouette de jeune femme. Il se redressa.

    - Sullyvanne ?

    - Quoi ?

    - Tu apparais ?

    - Si tu écoutes mes explications sans me critiquer ça peut faire un lien.

    - Alors je vais recommencer à te critiquer.

    - Tu es méchant, tu m’énerves ! Je boude !

    - Au moins je lirais tranquillement.

     

    1 semaine plus tard.

     

                Jean-Marc vint se mettre devant le bureau de sa collègue. Celle-ci terminait de corriger un devoir. Mathias était assis sur le bureau, comme bien souvent. Et comme chaque jour, il avait une tenue différente. Cette fois, une robe à paillette rouge, fendue sur le côté et des spartiates hautes. Les rubans de sa chevelure y étaient accordés.

    - J’ai fini…

    - Moi aussi. Répondit Faustine en souriant.

    - Honneur aux femmes.

    - J’ai trouvé le texte et le style bon… mais ça manque d’émotion et Sullyvanne a raison. Navré de te l’apprendre.

    - Hahaha ! Claironna la demoiselle.

                Mathias applaudit en souriant. Faustine sortit une liste des soucis qu’elle avait notés. Ça faisait une quinzaine de pages, au bas mot. Jean-Marc pinça les lèvres puis lui prit le paquet.

    - Merci. Ton texte… est bon. Il y a de bonnes idées, une bonne approche… Mais un peu trop d’homosexualité !

    - Euuuuh ? Dirent Mathias et Faustine d’une même voix.

    - Un baiser. Des allusions. C’est de trop !

    - Faites pas attention. Répondit Sullyvanne. Il crie toujours que je suis hétérosexuel et qu’il me le prouvera !

    - Peut-être… toujours est-il que… je veux bien voir s’il est possible de faire une suite. Marmonna-t-il, de mauvaise foi.

                Et pourtant, un éclair frappa la pièce. Il tourna la tête pour voir une silhouette apparaître.


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  • Chapitre 12 : Apparence.

     

    - Pitié ! Dites-moi que je peux encore conjurer cela !

                Il se reçut des regards surpris de tous ses collègues, sauf Faustine. Celle-ci ricanait en notant de choses sur un papier. Elle se reçut un regard noir de Jean-Marc qui l’ignorait. Mathias applaudissait de plus belle, maintenant debout.

    - Je ne vais pas écrire la suite ! Hors de question ! Je ne veux pas !

                Mais c’était trop tard. Le corps prenait forme. Et il reçut deux regards on ne peut plus réprobateur. Celui de Mathias et celui de Faustine.

                La forme qui était face à eux n’avait rien à envié à la beauté folle et ravageuse de Mathias, tout au contraire. Un corps féminin, bien formé. Des grands yeux bleu profonds, un visage rond, un sourire tendre et doux, une peau ni trop pâle ni trop bronzé. Elle avait de très longs cheveux brun striés de bandes blanches. Des oreilles de furet sortait de sa chevelure. Une longue queue touffue s’enroulait autour de ses jambes. C’était plutôt facile fut qu’elle portait une robe ultra-courte avec une longue cape.

                Et il y avait autre chose : une paire de sein on ne peut plus opulent.

    - Sérieux ? Dirent Faustine et Mathias d’une même voix.

    - Un pervers je vous dis. Soupira Sullyvanne.

                Mathias fit la moue et retira sa robe, ayant un short dessous, pour le donner à son amie. Il croisa ensuite les bras devant son torse mal à l’aise. Faustine s’empara de son cahier et écrivit rapidement quelques mots. Le travesti eut un soupir rassuré dès qu’une robe chinoise enserra ses formes.

                La création de Jean-Marc enfila la robe alors qu’Armand Jones, professeur d’anglais, vint vers lui.

    - Il faut que tu ailles chercher une ordonnance auprès d’un médecin… il te faut des antidépresseurs Jean-Marc… ça ne va vraiment pas. Remarqua-t-il.

    - C’est vrai qu’en ce moment, je suis un peu plus mal. Je viens de finir un roman et… stress d’auteur. Rit-il.

    - Je ne connais pas ça. Tu vas en faire une pièce de théâtre ?

    - Pourquoi pas ? Rigola-t-il, suivant son ami jusqu’à son bureau.

                Faustine soupira fortement alors que Mathias aidait sa comparse a ajusté la robe.

    - Il y a des règles ? Demanda-t-elle.

    - Pas vraiment, reste près de ton auteur, c’est le mieux.

    - Ok ! S’il veut bien de moi. Rit-elle.

    - Visiblement, il t’a fait à son goût. Marmonna Faustine.

    - Oui. Ricana nerveusement la semi-furette.

    - Bon courage. Lui sourit Mathias.

                La demoiselle hocha la tête en s’efforçant de sourire. Elle savait bien que Jean-Marc n’était pas toujours très gentil. Et il n’était pas emballé par l’idée d’avoir une création avec un corps. Elle se sentait un peu rejeté.

                N’ayant pas envie de rester là, elle s’en alla et elle se mit à flâner un peu partout.

     

                Sullyvanne était assise dans le divan pendant que Jean-Marc terminait la préparation de son poisson en papillote.

    - On va pouvoir travailler alors ? Sourit-elle, admirant le tissu de la robe de son ami.

                Elle était sûre de pouvoir l’appeler de la sorte à présent.

    - Oui. Sort ma machine à écrire.

                La demoiselle se leva et courut vers la nouvelle machine. Les lettres étaient moins grippées sur celle-là, ça facilitait l’écriture même si ça donnait moins l’impression d’écrire comme « au bon vieux temps ». Malheureusement, elle avait oublié ce que Mathias lui avait déjà signalé : elle n’arrivait pas à le toucher.

    - Je ne peux pas le prendre.

                Le professeur soupira puis vint la chercher et la posa sur son bureau. Il s’assura qu’il était exactement comme il voulait le voir puis retourna s’occuper de son repas. Sullyvanne s’assit sur le bureau, juste à côté de la machine.

                Elle attendit un moment que Jean-Marc revienne. Il posa son assiette et se mit devant sa machine à écrire. Il commença alors à taper en mangeant son plat à intervalle régulier. Sullyvanne était surprise de sa méthode de correction mais elle savait aussi que son créateur avait des façons très atypiques de faire.

                Elle se disait qu’il y avait peut-être une liste de chose qu’il voulait corriger ou encore le listing des personnages. Une ligne de conduite etc.

                La page tardait à venir puisque l’homme continuait de manger. Sullyvanne trépignait d’impatience, agitant les jambes au rythme des clapotis sur les touches.

                Finalement, la première page fut tirée de la machine. Elle fut posée juste derrière la machine. La semi-furette put alors se pencher et elle lut ce qui avait été écrit sur la feuille.

     

    « Prologue

    Shona OCeallaigh se rendit immédiatement compte que quelque chose nallait pas. Il y avait quelque chose dans lair qui lui faisait comprendre que sa fille ne reviendrait pas.

    Elle ne lavait plus vue depuis seulement six heures, et pourtantpourtant il y avait quelque chose qui la houspillait.

    Elle avait cette certitude. Non à cause de la dispute avant que Sullyvanne nait dans sa chambre. Non à cause de son absence un peu trop prolongée…

    Juste par cette intuition quavaient les mères. »

     

    - C’est… la suite ? Demanda Sullyvanne, surprise.

    - C’est ce pourquoi tu m’as houspillé, non ? Répondit Jena-Marc. Avec tes idées !

    - … Mon dieu. Il faut vraiment que je demande de l’aide à Faustine…

    - Pourquoi ? Soupira l’homme. Qu’est-ce que j’ai encore mal fait ?

    - Tu ne vas pas écrire la suite alors que ton premier volet n’est pas corrigé ? Enfin… tu n’as pas de petites corrections à faire… ce sont de corrections suffisantes pour que tout change dans ton volet deux… d’accord tu peux mais tu te compliques la tâche.

    - Je ne vois pas pourquoi ? S’agaça encore Jean-Marc.

    - Parce que tu ne m’as même pas cerné. Gémit Sullyvanne.

                L’homme fronça les sourcils.

    - Comment pourrais-tu écrire sur ma personne sinon ? Si tu ne me connais pas ?

    - Mais si je te connais… tu… bon très bien ! Laisse-moi écrire maintenant !

                Sullyvanne soupira puis reprit sa lecture, se retenant de faire la moue ou d’agir comme une gamine. Ça aussi c’était un trait de son caractère. Mais son créateur n’en avait même pas conscience. Même avec ce corps, elle se sentait si… insignifiante.


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  • Chapitre 13 : Essai.

     

                Sullyvanne courrait dans les couloirs de l’école. Elle trouvait ce sentiment gratifiant. Elle pouvait réellement bouger son corps comme elle voulait, quand elle voulait. Elle n’avait qu’une limite : celle de son corps. Avec une poitrine si imposante, c’était des fois douloureux de courir ainsi.

                Elle traversa un mur puis l’autre jusqu’à trouver finalement ce qu’elle cherchait : Faustine et Mathias. Elle sourit de toutes ses dents.

    - J’ai déserté !

    - Déserté ? Rit Mathias, assis sur le bureau de sa créatrice, comme d’habitude.

                Comme chaque jour, il avait changé de vêtements, troquant les tenues plus longues pour celles qui étaient courtes.

    - Jean-Marc engueule sa voiture. J’avais besoin de votre aide ! Jean-Marc est en train d’écrire la suite… mais il ne me connaît pas… est-ce qu’il peut seulement continuer ?

    - Ça dépend. Supposa Faustine.

    - Je préfère être sûre… je veux pas qu’il me massacre moi. Bougonna Sullyvanne.

    - Je comprends. Répondit Mathias.

                Il sauta sur le sol et vint prendre son amie dans ses bras en souriant de toutes ses dents. Elle répondit par un sourire en se serrant un peu contre lui. Elle s’éloigna ensuite. Faustine prit quelques notes avant de sourire à son tour.

    - Je prendrais quelques mesures… mais faut pas s’attendre à grand-chose venant de lui.

    - N’est-ce pas ! S’écria Sullyvanne.

                Faustine eut un léger sourire puis elle reprit ses corrections, laissant les deux créations discuter ensemble. Ils avaient beaux faire tout le bruit qu’ils voulaient, personne ne les entendaient à part la femme.

                Elle était la seule à devoir supporter cela. C’était un mal pour un bien. Elle apprenait à oublier le tohu-bohu de ses étudiants par exemple.

     

                Le soir venu, Jean-Marc était celui qui accueillait sa collègue chez lui. Il avait fait un bon repas qu’il avait posé sur la table. Table qu’il n’utilisait jamais. À vrai dire, c’était comme s’il était en tête-à-tête avec Faustine. Il ne savait pas ce qu’il pensait d’elle, ni s’il l’appréciait vraiment. Mais il devait bien avouer qu’elle avait du charme avec ses grands yeux noirs, un point de beauté au coin de l’œil gauche.

    - J’espère que tu aimeras. Dit-il, rigide.

                Faustine lui offrit un léger sourire en retour. Elle avait presque l’impression que ses dents allaient faire des claquettes. Elle n’était pourtant pas si effrayante. Certes, elle savait que son air donnait des sueurs froides et qu’on la traitait souvent de pseudo-gothique, et ce malgré ses cheveux blonds, mais elle n’était pas effrayante, si ?

    - C’est gargantuesque comme repas. Scanda Sullyvanne en souriant de toutes ses dents à son créateur.

                L’homme sourit à peine.

    - Qu’est-ce que vous avez prévu ? Demanda-t-il.

    - Une interview ! Sourit Mathias.

    - Hein ? Fit Jean-Marc.

                Sullyvanne retint une pique du genre « on dit « pardon » », ne tenant pas à ce que ça se retourne contre elle.

    - Tu fais comme une interview à Sullyvanne et tu vois ses réponses. Ça suffira déjà à ce que tu la comprennes mieux. Et je pense que, pour toi aussi, ce sera plus agréable. Dis-toi qu’elle te houspillera moins. Avança Faustine.

    - Et qu’elle épargnera tes oreilles. Sourit Mathias.

    - Très bien…

                Jean-Marc avala un morceau tendre de poulet avant de se tourner vers sa création.

    - Bien euh… qu’elle est ta couleur préférée ?

    - Orange ! Sourit Sullyvanne.

                Faustine prit un petit cahier fais main et elle le jeta à Jean-Marc. Celui-ci le prit en la remerciant vaguement. Il récupéra un stylobille et prit note. Il ne savait pas à quoi ça rimait mais s’il pouvait mettre tout le monde d’accord, ce serait déjà plus évident.

    - Quel est… ton animal favori ?

    - Hm… le homard dans mon plat et le lapin dans mes bras ! Rit-elle.

    - Tu cuisinerais du homard ? Demanda Mathias tandis que sa créatrice mangeait.

    - Vui ! C’est un plat comme un autre. Répondit Sullyvanne.

    - J’vois… bon à savoir ! Tu es un monstre impitoyable !

                La demoiselle rit à cette réponse alors que Faustine ne pouvait s’empêcher de sourire, pour sa part.

    - Bien… quels sont tes rêves et aspirations ?

    - Hm… voyons… Au prime abord, ce qui comptait pour moi c’était de devenir une cuisinière compétente. Je voulais une jolie vie, une belle maison près de la forêt et une compagne agréable.

    - Tu es donc… gouine… Marmonna Jean-Marc.

    - Lesbienne. Protestèrent Mathias et Sullyvanne d’une même voix.

                Faustin marmonna quelque chose qui devait ressembler à « sale homophobe ». Jean-Marc lui envoya un regard noir en marquant sur sa feuille.

    - Alors… maintenant c’est quoi ?

    - Je pense que je veux protéger mes amis et les différents mondes ! C’est ce qui est le plus important pour l’instant. Si je dois donner ma vie pour ça… je pense que je peux le faire !

                Jean-Marc annota accord. Il continua de poser des questions à la demoiselle, élargissant ses connaissances sur elle. Il devait toutefois supporter tous les commentaires de Mathias et de Faustine.


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